Au coeur de la nuit… Debout de Grenoble.

juin 10, 2016 / 0 comments

Née le 31 mars après une manifestation contre la loi du travail, la Nuit Debout a occupé à Grenoble depuis le 7 avril la place de la MC2 à Grenoble.J’ai voulu en savoir plus sur ce mouvement. J'ai décidé de plonger au cœur du débat autour de ce mouvement avec un état d'esprit ouvert mais critique. 

Un mouvement social se différencie des autres mobilisations en ce qu’il se centre davantage sur une autre idée de société que sur une revendication spécifique, comme l’explique Geoffrey Pleyers, un sociologue belge.

Née le 31 mars après une manifestation contre la loi du travail, la Nuit Debout a occupé à Grenoble depuis le 7 avril la place de la MC2 à Grenoble. Ce mouvement se dit apolitique et cherche des solutions à une « démocratie qui ne fonctionne pas » selon un manifestant. On en entend beaucoup parler, en bien sur leur site, souvent en mal à la télévision, sur les radios. J’ai voulu en savoir plus sur ce mouvement. J'ai décidé de plonger au cœur du débat autour de ce mouvement avec un état d'esprit ouvert mais critique.

Avant de m'aventurer sur les terres conquises par l'insurrection, j'ai décidé dans un premier temps de réaliser un sondage. Le panel des personnes qui ont répondu se constitue de jeunes d'une vingtaine d'année, de personnes lancées dans le monde du travail, d'autres bénéficiant du RSA, de retraités et d'adolescents, formant ainsi un groupe hétérogène. Ce panel, s’il ne représente pas parfaitement la société, il est le reflet d’une partie de la population. Il constitue une première approche pour appréhender la vision qu'ont ces personnes du mouvement. Vous pouvez en consulter les résultats ici :

Il en ressort que le mouvement est vu d'un œil plutôt positif mais que peu ont déjà assisté à un événement organisé, cependant, ils ne rejettent pas l'idée d’y remédier. Pour une large majorité, l'instauration de la Nuit Debout à Grenoble et une bonne chose. Les personnes qui ont répondu la considèrent comme tout à fait justifiée. De même, beaucoup trouvent qu'on ne parle pas assez du mouvement. Dernière réponse : lorsqu'on leur demande s'ils pensent que la Nuit Debout débouchera sur quelque chose de concret, peu y croient et la moitié des convaincus mise davantage sur un aboutissement artistique du projet.

Mais qu'en est-il vraiment au cœur du mouvement ? Le rendez-vous est pris mardi 18 mai à la MC2. Un occupant de la place me confie ces quelques mots : « C'est plus la même énergie », avant d'ajouter : « Les premiers impliqués sont partis, le mouvement ici ne leur convenait plus. Parfois, c'est vraiment n'importe quoi ! » Quand je lui demande plus de précisions, il rechigne et me remercie avant de partir. Cela ne m’étonne pas, j’ai pu constater les réticences que la Nuit Debout à Grenoble entretient avec la presse qu'ils jugent « Partiale et politiquement impliquée ». Je rentre donc un peu bredouille. Personne ne souhaite s'exprimer au nom du mouvement et on me demande même de taire les noms de ceux qui ont accepté de parler. Pourtant, de bonnes idées, La Nuit Debout en a, elles sont listées, de façon non-exhaustive sur le blog médiapart du groupe et on peut y retrouver notamment la semaine de 32h, une augmentation des salaires, ainsi qu'une réquisition des logements vides pour héberger les SDF. Au milieu de ces revendications s'en logent d'autre, plus confuses comme la fin des lobbys en France ainsi qu'une réforme scolaire visant à aérer les classes.

Depuis, le 18, sur la place de Verdun, les manifestants ont voté pour ou contre le retrait du squat légal à la MC2. La mairie les avait sommés de condamner les violences s'ils voulaient y rester. La voix du mouvement s'est fait entendre et certains manifestants ont déclaré que le mouvement « Continuera, que ce soit de façon légale ou non. »
 

Les craintes des interrogés par le sondage semblent se confirmer : la Nuit Debout sur Grenoble s'est essoufflée et la mobilisation semble ne plus suffire à faire bouger les mentalités. Des actions avaient été menées mais le trop grand nombre de casseurs parmi eux et l'image négative qu'ils véhiculent n'a sans doute pas aidé. Le mouvement semble avoir été reprit par la CGT, qui continue la lutte par des actions coup de poing. La pénurie d'essence qui a paralysé la France une semaine durant a de quoi faire réfléchir les dirigeants. Le syndicat s'est offert une belle démonstration de puissance mais une fois de plus, le gouvernement ne cède pas, la loi du Travail semble toujours à l'ordre du jour et ce, grâce au passage en force de Valls grâce à l'article 49-3.

J’aime ce concept de La nuit debout : permettre au citoyen d'envisager une réelle démocratie. Mais il semble lui-même avoir démontré ses limites. Avec des Assemblées générales à tous propos, des discussions qui s'éternisent sur des sujets aussi divers et variés que l'organisation d'une prochaine manifestation, la tenue d'un événement ou encore l'orientation générale du mouvement, et au final, personne ne prend la responsabilité de porte-parole, il en découle un marasme confus. Lorsque l'on cherche des informations, on trouve tout et son contraire. Plus préoccupant encore que la présence de casseurs parmi leur rangs, je tiens à exprimer ce qui m’a le plus déçue : l'une de leur délibération visait à savoir s’ils allaient autoriser la presse ou non à filmer ou à parler du mouvement. La liberté d'expression n'est-elle justement pas un fondement principal d'une démocratie fiable ?

Pour connaître la planification des rendez-vous : http://nuitdeboutgrenoble.fr/

Sources :
Blog Médiapart de la Nuit Debout
Interview de Geoffrey Pleyers
Image : Ludovic Chataing